Les femmes et leur putain d’instinct maternel. J’ai pas besoin d’une mère, moi, j’en ai déjà une et qu’elle aille se faire voir celle-là. J’ai pas de problème avec les femmes, j’ai juste un problème avec ces cagoles qui te prennent pour un enfant, à te couver, à vouloir savoir où tu es, à te faire à bouffer comme si t’étais pas capable de faire cuire un oeuf, ... J’ai pas de problème avec les femmes, seulement avec celles qui se croient poussées par la passion freudienne, à te psychanalyser, te trouver des complexes d’Oedipe etc. Il y en a trop. Trop qui veulent te guérir, trop qui veulent te redonner espoir alors qu’il n’y en a plus aucun, trop qui cherchent à gagner ta confiance alors qu’elles n’en sont pas dignes.

“T’es qu’un c…” Elle s’arrête net. La femme qui partage mes traits, mon nom de famille, la même maison, cette même femme qui en a chié pour me mettre au monde est sur le point de m’insulter. Dix-huit ans, coincé dans une vie dont je ne veux pas, dont je n’ai jamais voulu, avec des gens que je déteste et qui me tirent vers le bas. C’est qu’une engueulade de plus, mais c’est peut-être celle de trop. “Un quoi ? Vas-y, dis-le !” Je dis ça calmement, mais mes poings se serrent. J’me retiens d’exploser parce que je sais qu’en étant calme, c’est elle qui va exploser et je pourrai enfin me libérer de ce putain de cocon familial, comme ils l’appellent. “Un con, Clyde, t’es qu’un petit con, on t’a pas élevé comme ça, je te reconnais plus” Elle hurle, son visage rougit, ses traits se tendent et les miens aussi par la même occasion. Nan, on m’a pas élevé comme ça, parce que tu veux la vérité maman ? T’étais la seule à m’élever, et à trop vouloir te faire aimer, t’as réussi à faire tout le contraire. Je peux plus te supporter, j’arrive plus à résister à l’envie de gueuler quand je te vois la fermer devant mon père, rien dire pour pas provoquer une énième crise avec lui. J’peux plus supporter de le voir te détruire parce que ça me détruit moi encore plus, j’ai pas le droit d’être moi ici, j’ai pas le droit d’être qui je suis vraiment. Tu m’dis que j’suis con tous les trois jours, il me répète que je vaux rien, que personne pourra jamais me supporter, mais pourquoi vous me répétez ça ? Pourquoi ? Me rabaisser plus bas que terre ?. Tu dis que j’ai un problème, mais c’est toi le problème, c’est toi et lui mes putains de problèmes. “Tu sais quoi ? J’me tire d’ici, c’est fini tout ce bordel. J’m’en vais, j’reviendrai si l’vent me porte jusqu’ici, j’ai besoin d’air et t’as pas besoin d’un con en plus dans ta vie” Je tourne les talons, m’en vais rapidement et j’boucle ma valise. Elle est prête depuis plusieurs semaines, j’ai juste à rajouter quelques trucs et c’est fini. Je prends ma planche, tout mon matos’ de surf et je claque la porte d’entrée. “Clyde, déconne pas, reviens-là !” Elle crie à travers la fenêtre mais le moteur de la voiture est déjà en route. La vérité, c’est que ça me fend le coeur de la laisser, de la voir comme ça, désemparée. Mais c’est pas cette vie-là que je veux, c’est même l’exact opposé alors autant fuir maintenant, pendant que j’en ai le courage. Ouais, c’est égoïste, j’le sais, et j’m’en fous presque. J’ai pensé au reste du monde pendant toute ma vie jusqu’à présent, pendant dix-huit années et tu veux savoir ce que ça a donné ? J’me plais pas, j’suis pas heureux, j’suis déprimé, peut-être même dépressif. Alors là, à cet instant, j’veux qu’une chose c’est penser à moi pendant quelque temps, me faire passer avant le monde entier. Peut-être que là j’connaitrai enfin le bonheur comme les autres le décrivent. J’suis qu’un putain d’égoïste, mais qu’est-ce que c’est bon, qu’est-ce que je me sens bien. Ce soir-là, je dors dans ma voiture, et le soir d’après aussi, le temps de vendre tout ce que je peux pour me faire du frique. J’vends même ma planche, celle qui m’a été offerte par mon grand-père pour ma majorité. Ca m’brise le coeur de m’en séparer mais j’ai pas le choix, il faut savoir ce qu’on veut dans la vie, et là, tout ce à quoi j’aspire, c’est lisbonne. Un ticket aller, sans retour s’vous plaît. J’ai jamais prié mais en montant dans l’avion, j’ai souhaité une seule et unique chose : ne plus jamais reposer les pieds à southampton.

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Et surtout, bon jeu parmi nous !