Amsterdam c'est un nid douillet, un port malfamé, une capitale couverte de croûtes, des putains dans les vitrines et d'la weed dans les cafés, mais putain c'que c'est bon Amsterdam. Il y a des junkies qui s'cament, il y a des flics à la tonne qui dealent de la bonne, des bateaux amarrés, des pêcheurs bourrés et des filles de joie s'balandant sur l'bitume, faisant l'tapin dans l'urine au milieu des rats et d'la brume du soir. Mais putain c'que c'est bon Amsterdam. Ça fume, ça gerbe, ça cri. C'est Amsterdam cette putain d'ville. Et dieu sait qu'on y est bien, malgré les matelots et leur caractère de chien, les barmans et leurs sourires de requin, les poivrots et leur haleine de chacal, ouais on y est bien à Amsterdam. Parce que la nuit il y fait bon vivre, parce que la nuit tout est doré et vif, parce que la nuit il y a les étoiles qui brillent au dessus du port d'Amsterdam. Parce qu'Amsterdam c'est la ville du monde, c'est là où on croise des français, des hollandais, des suisses, des anglais et des chinois. On croise de tout, c'est l'centre du monde, c'est l'cœur même de l'humanité et il bat la chamade. Amsterdam c'est le toit de ceux qui en ont besoin, c'est le squatte du peuple, là où on traîne le long des quais brumeux et humides, là où on fait d'mauvaises rencontres, là où les pires rencontres sont les meilleures. Là où tu né, tu grandis, tu parts, tu reviens, et tu crèves. C'est Amsterdam. Et dans les ruelles d'Amsterdam on peut entendre la vermine grouiller, mais aussi les pas d'une petite fille qui se presse vers un vieux van rouillé, valise à la main. Tout juste huit ans, juste assez assez vieille pour faire le trottoir dans l'port d'Amsterdam. Et au milieu des consommateurs, son père la suit, des babioles dans les bras, la pressant de courir vers le van. Puis on entend au milieu des grésillements de la foule, au milieu des seringues, les cris d'une femme qui leur court après, mais on l'ignore. Et la petite monte, et son paternel monte. Au milieu de la brume, dans le port d'Amsterdam un pot d'échappement retenti, et les pleurs d'une femme laissée sur le carreau, avec seulement ses mains pour pleurer un coup. Mais ça n'arrête pas l'port d'Amsterdam qui vit et vivra dans le cœur de chaque marin, chaque tocard, chaque putain, chaque bambin jusqu'à la fin d'ce monde. Parce qu'Amsterdam est éternel, c'est la violence, la débauche, l'harmonie et l'chagrin. Amsterdam c'est sa ville, Amsterdam c'est son cœur. Et la gamine elle s'en va dans l'van roulant, elle quitte son cœur, son âme, elle quitte Amsterdam. Les paysages défilent, la flotte s'éloigne, les canaux de jade sombre sous les ponts ressemblant au cercle de l'enfer, mais n'sont maintenant plus que de vagues couleurs au loin. Et la gamine elle pleure pas, elle est avec son papa, elle pleurera pas, parce qu'Amsterdam est marquée au fer rouge dans sa peau, Amsterdam et ses drogués, ses bars et ses lumières froides. Puis la gamine elle va suivre le van, elle va tracer son chemin avec son paternel, l'étincelle dans les yeux et les ch'veux ébouriffés. Puis la gosse elle va voyager, elle ira loin j'te promets, loin du port d'Amsterdam et de ses rats galeux, et d'son brouillard d'miséreux. Jacques Brel il y connaissait rien à Amsterdam, il connaissait pas Amsterdam comme la gamine connaît ce port. Et elle part en vadrouille avec son van rouillé, les Indes et ses éléphants, le Tibet et ses temples, la Russie et ses enfants armés, le Japon et son sake, l'Italie et macho, l’Angleterre et ses keupons, l’Écosse et son whisky, la France et ses pessimistes, le Mexique et ses bottes en cuir, l'Amérique et ses flingues, mais c'rien par rapport au port d'Amsterdam. Oh non. La gamine elle a apprit beaucoup d'langues sur l'tas, mais elle cause l'hollandais et l'anglais, l'espagnol peut aller s'faire enfler. La gamine elle a vu du pays avec son van. La gamine elle est devenue pas normale. La gamine elle prend d'la came et fume comme un pompier, elle porte plus d'blanc mais du rose et du jaune pétard, la gamine c'plus la gosse d'Amsterdam, mais c'est toujours encré. Puis son père s'est cassé, il toussait comme un dingue, comme un camé sortant d'un squat, il est rentré au port d'Amsterdam et la gamine c'est plus une gamine c'est maintenant une femme, une femme de l’îlot d'Amsterdam. Et elle continue d'partir en vrille, mais elle oublie pas, elle traverse les pays en long en large, mais jamais elle va zapper, elle se pose un jour ou deux, et pense encore et encore, qu'elle vient d'Amsterdam. Mais maintenant il y a enzo et la gamine c'est Lisbonne qui rentre dans sa peau, cherchant à virer les lumières des lampadaires du port d'Amsterdam. Et la fillette elle regarde sa boite au lettres pleine à craquer de merdes pour trouver une carte postale des bateaux et des marins d'Amsterdam, et son paternel lui rappelle. Parce que Ricky elle vient d'un endroit où les putes sont en vitrine, les punks sont décérébrés, les camés vont tous crever, les bars sont bondés, les cassages de gueule sont fréquents, la weed qui pousse à gogo, les seringues qui ornent l'bitume, les gosses qui jouent à la balle, les rats qui tirent des balles, et les flics de vrais idiots. Ricky elle a les canaux du diable dans l'sang, elle a l'hollandais dans les veines, elle a Amsterdam dans l'coeur. Et son cœur elle va l'retrouver, c'est juré.  

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Et surtout, bon jeu parmi nous !