Tes doigts tremblent. Elle rigole et sa main frôle ta cuisse. T'en as rien à carrer, tu la calcule même plus. Les lumières se mélangent. La musique de fond remplit la pièce d'une brume envoûtante. Ton monde tourne au ralenti, tu le vois évoluer lentement en rythme avec la musique. T'as l'impression de plus rien voir du tout et en même temps tes pupilles captent chaque détail qui t'entoure. T'es comme sous dix mètres d'eau, ta vision se trouble légèrement. Tout est ombre et lumière à la fois. Tu t'imprègnes du moment. Un sourire vient se visser doucement au coin de tes lèvres. T'observes le mouvement. T'hoches parfois la tête ici et là pour combler le silence qui s'empare lentement de vous. T'écoutes que d'une oreille les tonnes de connerie que la rousse déverse à la seconde. Elle s'exhibe ouvertement devant toi mais tu la vois pas. Tu l'écoutes pas. T'as le regard qui surplombe son épaule, c'est pas elle que tu mates, non. Tes pupilles émeraude ont accrochées quelque chose de beaucoup plus intéressant. C'est la blonde, là-bas, celle qui danse comme si sa vie en dépendait. Tu l'as remarquée depuis que t'es arrivée. Ses cheveux blonds qui lui fouettent le visage s'envolent autour d'elle. Elle a un air félin, un air sauvage. Et t'as besoin de ça aujourd'hui. Un sourcil redressé, tu peux pas t'empêcher de noyer tes iris dans l'océan fauve qu'est sa silhouette. T'attends quelques minutes mais la rousse te donne des envies de meurtre, tu satures. Tes doigts se referment sur le verre que t'as en main. Un peu trop fort. Un peu trop brusquement. Tu le portes rapidement à ta bouche et l'termines d'une traite. L'alcool te brûle la gorge, tu voles pendant quelques longues secondes. Le visage de la rousse n'est plus qu'une putain d'ombre. Sa voix criarde n'est plus qu'un fond sonore, à peine audible. Tu te lèves avant de t'enfoncer dans la masse de corps qui se déhanchent sous tes yeux. Tu te casses sans un mot pour l'autre conne qui doit probablement t'insulter avec toute l'intelligence dont elle fait preuve. Tu te rapproches d'elle. Pas après pas. Les fins traits de son visage se découvrent petit à petit, son allure enfantine mais aussi indomptable t'apparait plus claire encore, plus distincte. T'hésites pas, t'as à peine le temps d'enregistrer ton geste que ta main s'fraie déjà un chemin jusqu'à son bras. Peau contre peau. Un sourire fend tes lèvres. « Ça te dit qu'on s'barre d'ici ? » Simple, direct. T'aimes pas tourner autour du pot. T'ajoutes quand même parce que tu veux pas passer pour le pervers de base « Et moi c'est Oz  » Comme si ça changeait quelque chose, tu rejettes la faute sur l'alcool. Ouais, c'est toujours la faute de l'alcool.